L' alcool & drogues pour l'Ado

Le 16/12/2020

Dans Bébés - Enfants - Ados

Alcool, cannabis, dépression... Que peuvent faire les parents ?

Face au repli sur soi d'un jeune, aux tentatives de suicide et aux conduites à risque, il est inefficace, selon le psychiatre David Gourion, de faire la morale et de recourir à l’autoritarisme.

  • Ne pas banaliser la souffrance
  • Consulter un psy ou un médecin
  • Évaluer la dépendance
  • Ne pas sévir

Ne pas banaliser la souffrance

« Nous avons tous tendance, parfois, à faire l’autruche pour essayer de nous rassurer. Mais les parents ne doivent pas banaliser la souffrance psychique de leur jeune, ni tenter d’y apporter des explications simplistes. La deuxième difficulté, c’est de réussir à entrer dans le dialogue. Les parents me disent : “Je ne sais pas comment aborder mon fils ou ma fille pour lui parler de ses problèmes psychologiques, sa réaction me terrifie.” Je leur réponds d’oser le faire avec des questions toutes simples : “Tu n’as pas l’air bien. Je trouve que tu as l’air triste. Qu’est-ce qui se passe ?” Si au fil de la conversation apparaissent des propos inquiétants et morbides, il est important de demander : “As-tu déjà pensé à la mort ?” Si c’est le cas et qu’il a des idées suicidaires, en parler le soulagera énormément. Il faut ensuite chercher à savoir pourquoi il pense à la mort, à quel point ses idées suicidaires sont concrètes et, le cas échéant, lui proposer de voir un psychiatre très vite. »

Consulter un psy ou un médecin

« S’il ne veut absolument pas voir de psy, je recommande aux parents d’aller consulter eux-mêmes, d’expliquer les symptômes de leur enfant. Il ne s’agira pas de poser un diagnostic à distance, mais le psy pourra leur donner des conseils concrets : ce qu’il faut dire, faire, comment il est possible de lui faire accepter une prise en charge en l’amenant à reconnaître ses difficultés et sa souffrance. C’est mieux quand les parents viennent ensemble : ils seront plus convaincants avec leur enfant s’ils sont tous les deux persuadés du bien-fondé de la démarche – ce qui n’est pas toujours le cas, loin de là ! Conduire le jeune à un premier contact avec les soins, c’est possible à partir du moment où ses parents le veulent vraiment, sont fermes et tiennent bon. Il faut qu’ils se disent : “C’est le même enjeu que s’il avait un diabète ou une leucémie. On ne lui laisserait pas le choix de ne pas se soigner.” »

Évaluer la dépendance

« Il faut distinguer ce qui est banal de ce qui ne l’est pas. Plutôt que de porter des jugements sur la consommation de cannabis ou d’alcool de leur enfant, les parents doivent dire : “Nous ne sommes pas des spécialistes. Il y a des experts addictologues qui peuvent te donner un avis. Peut-être qu’ils te diront que ta consommation n’est pas problématique ni dangereuse, et cela nous rassurera. Tu feras ce que tu veux de l’évaluation.” Pour mesurer cette consommation, les médecins utilisent des tests simples [présentés dans l’ouvrage référencé ci-dessous, ndlr]. Il est clair que si le jeune a besoin de son verre ou de son joint quotidien, s’il fume du cannabis ou qu’il boit seul pour soulager des angoisses ou pour dormir, s’il a essayé d’arrêter sans y parvenir, s’il a des mauvais résultats à l’école, etc., ce sont des symptômes révélateurs d’une addiction. »

Ne pas sévir

« Surtout pas… L’argument d’autorité ne passe pas chez un jeune âgé de 16 ou 17 ans. Cela peut à la limite fonctionner jusqu’à 12-13 ans maximum. Après, cela débouche sur des tensions majeures, des situations dramatiques de fugue, de bagarre, de violence intrafamiliale. Et le bras de fer sera toujours perdu par les parents…

En revanche, il faut dire à son enfant : “Nous savons que ces prises quotidiennes sont une source et une conséquence de souffrances psychologiques, c’est devenu une maladie pour toi, tu as besoin d’une aide médicale que nous ne pouvons t’apporter sans une intervention extérieure.” Le bon axe se situe du côté de la compréhension, de la bienveillance et de la fermeté. Souvent, la prise de substances sert à calmer l’anxiété, à se détendre, à s’endormir.

C’est seulement dans le lien humain, et pas dans la culpabilisation ou la menace, que nous pouvons faire entrer un jeune qui souffre dans un circuit de soins qu’il va investir réellement – et qu’il n’intégrera pas uniquement pour que ses parents le laissent tranquille.

Il s’agit de partir non pas de l’inquiétude des parents mais des projets et des objectifs de nos jeunes patients : s’ils se plaignent de fatigue et de troubles de la concentration qui les gênent dans leurs activités ou dans leur scolarité, nous les amenons à faire le lien avec leurs prises de toxique. Cela ne fonctionne que dans la confiance et le respect mutuel, et pas dans un jeu du chat et de la souris. »